La société Pec-Engineering exploitait une usine d'incinération. Face à la vive hostilité de la population locale, le maire de la commune, par arrêté du 30 octobre 1981, interdit l'exploitation de l'usine.
Le tribunal administratif de Lille, par jugement du 19 octobre 1982, a rejeté la requête de la société Pec-Engineering tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 octobre 1981 du maire de Lillers.
La société Pec-Engineering saisit alors le Conseil d'État afin d'obtenir l'annulation du jugement et de l'arrêté.
Le maire de la commune de Lillers pouvait-il s'immiscer dans l'exercice de la police spéciale des installations classées que la loi attribue au préfet et au gouvernement?
Par un arrêt du 15 janvier 1986, le Conseil d'État annule le jugement du tribunal administratif de Lille ainsi que l'arrêté du maire de Lillers.
Le maire ne pouvait légalement se substituer au préfet du Pas-de-Calais pour interdire provisoirement l'exploitation de l'usine.
En effet, la loi prévoyait que le maire ne pouvait s'immiscer légalement dans l'exercice de cette police spéciale, qui appartenait au préfet et au gouvernement, qu'en cas de péril imminent, qui n'était pas présent en l'espèce.
En effet, en l'espèce:
- la pollution atmosphérique causée par le fonctionnement de l'usine ne menaçait pas gravement la santé et la salubrité publique ;
- la vive hostilité de la population locale et le risque de troubles à l'ordre public qui en résultait ne constituaient pas un péril imminent.
Les articles L. 131-2 et L. 131-7 du code des communes n'autorisent le concours entre la police administrative générale, exercée par le maire, et la police spéciale des installations classées, exercée par le préfet et le gouvernement, qu'en cas de péril imminent.
Conseil d'Etat, 6 / 2 SSR, du 15 janvier 1986, 47836, mentionné aux tables du recueil Lebon
Conseil d'Etat - 6 / 2 SSR
statuant
au contentieux
- N° 47836
- Mentionné dans les tables du recueil Lebon
Lecture du mercredi 15 janvier 1986
Président
M. Coudurier
Rapporteur
M. E. Guillaume
Commissaire du gouvernement
M. Dandelot
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'État le 10 janvier 1983, présentée pour la société Pec-Engineering, dont le siège est [...] à Paris, représentée par son président-directeur général, et tendant à ce que le Conseil d'État:
1°) annule le jugement du 19 octobre 1982 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du maire de Lillers en date du 30 octobre 1981 lui ordonnant de cesser totalement l'exploitation de l'usine d'incinération installée au hameau de Hurionville ;
2°) annule pour excès de pouvoir cet arrêté ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Vu la loi du 19 juillet 1976 ;
Vu le code des communes ;
Vu le code des tribunaux administratifs ;
Vu l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ;
Vu la loi du 30 décembre 1977 ;
Après avoir entendu le rapport de M. E.Z., auditeur, les observations de la S.C.P. Labbé, Delaporte, avocat de la société Pec-Engineereing et de la S.C.P. Lyon-Caen, Fabiani, Liard, avocat de la commune de Lillers, et les conclusions de M. X, Commissaire du Gouvernement.
Considérant que les dispositions des articles L. 131-2 et L. 131-7 du code des communes n'autorisent pas le maire, en l'absence de péril imminent, à s'immiscer dans l'exercice de la police spéciale des installations classées que la loi du 19 juillet 1976 attribue au préfet et au gouvernement ;
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier et notamment de l'expertise réalisée par le laboratoire régional des ponts et chaussées de Lille, que la pollution atmosphérique causée par le fonctionnement défectueux de l'usine d'incinération du hameau d'Hurionville ne menaçait pas gravement la santé et la salubrité publique dans l'agglomération de Lillers ; que la vive hostilité de la population loicale et le risque de troubles à l'ordre public qui en résultait ne constituaient pas davantage un péril imminent ; que, par suite, le maire de la commune de Lillers n'a pu légalement se substituer au préfet du Pas-de-Calais pour interdire proviisoirement l'exploitation de l'usine litigieuse à la société Pec-Engineering par un arrêté du 30 octobre 1981 qui encours ainsi l'annulation ; que, par suite, cette société est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande dirigée contre cet arrêté ;
DECIDE:
Article 1er: Le jugement du tribunal administratif de lille en date du 19 octobre 1982 est annulé.
Article 2: L'arrêté du maire de Lillers du 30 octobre 1981 est annulé.
Article 3: La présente décision sera notifiée à la société Pec-Engineering, au maire de la commune de Lillers et au ministre de l'environnement.